Amélie ? Kent ? Keit ? Valencia ? Demoiselles en robes vertes, jaunes, orange, rouges voir pourpres, voici les variétés de mangues améliorées présentes au Mali et obtenues par greffage des variétés locales.
Les principaux bassins de production de la mangue se situent dans les localités de Bougouni, Yanfolila, Sikasso (3ème région), Koulikoro, Kati, Siby (2ème région) et Ségou (4ème région). Les vergers s’y succèdent et fourniraient quelques 540 000 tonnes de fruits par an sur une surface de 28 400 hectares bénéficiant ainsi à 150 000 producteurs. Les données statistiques sont très peu nombreuses et il ne s’agit là que d’estimations. Des systèmes de repérage et estimation plus précise du potentiel de production par télédétection sont en cours de mise en place.
La période productive étant relativement courte et la mangue étant un produit fragile, de grandes pertes sont observées chaque année faute de structures de conservation, conditionnement ou transformation pour absorber cette production.
Cette filière au potentiel fort suscite alors un grand intérêt de la part du gouvernement et des bailleurs de fonds.
Ainsi, le SIAGRI, Salon International de l’Agriculture qui a lieu du 24 au 30 avril à Bamako a consacré une journée entière à la mangue. Lancée par M. Tiemoko SANGARE, Ministre de l’Agriculture, conférences, témoignages d’acteurs, dégustations et animations lui ont fait honneur.
Avec un marché local peu rémunérateur, l’export est le débouché visé par les professionnels de la filière : marchés européens et bientôt nord africains, la mangue s’exporte fraîche ou transformée par bateau ou avion.
Des producteurs locaux aux revendeurs européens, le circuit structuré de la mangue fraîche.
Du verger de Bougouni à la centrale d’achat de Marseille ou Rotterdam, ce ne sont pas moins de trois étapes intermédiaires qui se succèdent.
Les pisteurs collectent tout d’abord les fruits auprès du producteur et les acheminent jusqu’à la station de conditionnement où les fruits arrivent en casier de 18 kg, pèle mêle et repartent en cartons de 4kg, calibrés, à un degré de maturité plus ou moins élevé selon qu’ils sont destinés au fret avion ou au transport bateau. Deux jours de transit en avion pour un prix de vente de 4€ le kilo contre deux semaines par bateau et un carton de 4 kg à 3-4 €, il va sans dire que la préférence des professionnels revient à la première formule bien que les coûts soient presque prohibitifs. Le producteur aura, quant à lui, reçu 1500 FCFA pour un casier de 18kg.
M. Konaté, directeur de la jeune Société Fruitière de Bougouni déplore les difficultés liées à l’approvisionnement qui sont un frein pour le développement du fret avion. Les coûts de transport ainsi que la vente à commission par les centrales d’achat européennes sont autant de contraintes soulevées par le directeur. Toutefois, la société est très récente et la structuration de la filière de façon globale n’en est qu’à ses balbutiements. Les acteurs ont besoin de formation en termes d’agronomie, gestion, économie de marché…
Les actionnaires de cette société sont des privés comme des structures publiques (collectivités territoriales, APEJ -Agence pour la Promotion de l’Emploi des Jeunes). La station emploie 45 personnes de façon permanente (5 gestionnaires et 35 trieurs). En fonctionnement pendant 4 mois de l’année, il est envisagé de l’utiliser pour le conditionnement du haricot vert en période d’hivernage (de septembre à janvier).
Abracadabra ! Voilà la mangue transformée
Côté producteurs et productrices, les moyens sont moins importants mais les bras et les idées sont là.
Ainsi, la coopérative féminine Jeka baara (espoir par le travail) en est un bon exemple. Composée d’une quarantaine de femmes, chacune vend sa production à la coopérative et cotise pour l’investissement dans le matériel de transformation. Pour la mangue, il s’agit de jus, mangue séchée et confiture. Le noyau est à l’étude pour en extraire l’huile, fabuleux remède contre les rides.
En lien étroit avec l’APCAM, les femmes de la coopérative ont saisi quelques caractéristiques fondamentales inhérentes au marché (respect des normes d’hygiène, notion de risque économique) et elles adoptent un comportement stratégique s’orientant vers une logique marchande
Ainsi, elles ont récemment puisé dans leur fonds de roulement pour investir dans un séchoir à gaz dont la capacité est dix fois plus importante que celle d’un séchoir solaire, leur objectif étant de réaliser une grande production à vendre à l’occasion du SIAGRI.
A Bamako, on trouve les produits de Jeka Baara au niveau de leur boutique et dans les alimentations et cybercafés. Les productrices/transformatrices se déplacent par ailleurs également sur les foires et salons nationaux, régionaux et internationaux pour faire la promotion de leurs produits et en assurer la vente. Mme Kone Rokiatou Traoré, présidente de la coopérative explique qu’elles recherchent désormais un partenaire fixe à l’étranger afin de faciliter la logistique et garantir l’écoulement de l’intégralité de leur production de façon continue. La coopérative permet de générer des revenus pour les femmes et elle leur donne également l’opportunité de recevoir de la formation (alphabétisation, gestion…).
Qualité et marchés de niche pour la reine…
La certification est recherchée par tous les professionnels.
Ainsi, M. Konaté convoite la certification GlobalGAP pour ses mangues fraîches, une reconnaissance de qualité de la production, obligatoire pour la grande distribution privée européenne. Par ailleurs, ayant signé un contrat avec le Mobiom, Mouvement Biologique du Mali, il va désormais exporter des mangues certifiées bio issues de vergers ainsi reconnus.
Ne pouvant pas encore prétendre à la certification équitable, les efforts vont aller dans ce sens à l’avenir afin de couvrir un marché européen exigeant mais également sensible à des paramètres tant organoleptiques que sociaux.
Soutien à la filière
Conscients de son potentiel, les bailleurs de fonds s’intéressent à la filière et appuient son développement via l’innovation technologique, l’accès au financement, la structuration de la profession, la construction d’infrastructures de conditionnement et transformation. L’accent est mis sur la commercialisation, la connaissance du marché, le marketing et la certification de qualité.
Ainsi, le PCDA, Programme Compétitivité et Diversification Agricole, d’envergure nationale est financé principalement par la Banque Mondiale et met, entre autres filières, un fort accent sur l’appui à la filière mangues
USAID, l’agence de développement américaine apporte un appui via son programme IICEM, (Initiative Intégrée pour la Croissance Economique au Mali) de même que l’agence Suisse Helvetas soutient le développement de la filière conventionnelle et biologique.
La saison ayant récemment débuté, des craintes se lèvent concernant la durée de la période pendant laquelle la cueillette est rentable. En effet, les pluies étant très précoces cette année, la mouche des fruits risque de se développer plus précocement, menaçant ainsi la qualité du produit pour lequel les autorités douanières européennes affichent une tolérance zéro id est sans aucune piqûre. Ceci constitue une raison supplémentaire pour envisager le marché nord africain, moins exigeant en termes de qualité.
En exploitant le potentiel de production existant et en se professionnalisant, les acteurs de la filière peuvent espérer faire de la filière mangue un secteur moteur de l’agriculture malienne.
Après l’or jaune, minerai présent dans le sous-sol malien et second produit d’exportation, l’or blanc constitué par son coton, le Mali aurait-il, avec sa mangue, fait la découverte de l’or aux couleurs de son drapeau ?
lundi 26 mai 2008
jeudi 15 mai 2008
Mali, que fais tu de ta terre et de tes bras ?
Du 21 au 27 avril, j’ai accompagné une mission de supervision d’un programme de la Banque Mondiale qui soutient le transfert de technologies agricoles et renforce la structuration des organisations paysannes. Un p’tit tour du pays du côté fruits de ses entrailles.
La filière RIZ, on en parle dans tous les sens autour de moi depuis 4 mois et je viens d’apercevoir le premier épi dans la région de Niono, dans le delta central du Niger, zone productive administrée par l’Office du Niger. Le pays n’est pas autosuffisant et importe de la Chine, de l’Inde d’où le contre coup ressenti ici suite à la hausse des prix internationaux. C’est la consommation principale en ville.
Un paysage magnifique, alternance de verdure, de canaux, de pistes de latérite, verdure encore mais c’est la canne à sucre qui en est à l’origine cette fois-ci.
Les CEREALES, nombreuses et à la base de l’alimentation en brousse sont cultivées de façon extensive : le mil, le sorgho, le fonio (graminées qui donne un grain très fin qui ressemble au couscous et affiche une digestibilité et des qualités diététiques intéressantes…en rotation avec le riz au niveau de l’assiette, c’est un bon deal !) le maïs, le blé de façon marginale.
Le COTON, est exploité dans la région de Sikasso, au sud est du pays pour sa fibre (il s’agit de la graine sur la photo). L’or blanc, tel était son petit nom auparavant, quand ça marchait mais la filière administrée de façon étatique depuis les temps coloniaux s’est peu à peu effondrée en raison d’une mauvaise gestion et d’un contexte commercial international difficile.
Les cotonculteurs bien lotis auparavant sont parmi les plus pauvres du pays désormais.
Alors on essaie de privatiser, donner de l’air à tout ce système figé mais… laborieux, épineux…
Les LEGUMINEUSES et le MARAICHAGE
Voilà présentés les deux produits ayant régner en maîtres incontestables dans l’agriculture malienne pendant longtemps. S’en est fini, l’heure est à « chacun a une place qui lui est réservée dans ce bas monde ».
Le niébé, espèce d’haricot, l’arachide, l’oignon, l’échalote, la tomate, le poivron, le piment, la pomme de terre ne se le sont pas fait dire deux fois.
Cultivé en rotation avec d’autres spéculations ou en contre saison (période sèche, quand on ne peut plus cultiver le riz), ces productions permettent de diversifier l’alimentation, de soulager les sols et de s’attirer une activité et des revenus surtout pendant toute l’année. Cela permet même aux jeunes gens de brousse de ne pas partir chercher leur vie en ville en vendant des cartes de téléphone, cirant des chaussures…C’est ça le pouvoir de la terre… et de l’intelligence humaine aussi.
LES FRUITS
Est-ce que je me lance ou bien je me retiens de vous déverser toute la passion que je nourris pour la mangue ? Je vais me retenir pour l’heure mais je vous promets un topo complet et percutant sous peu.
Alors, en dehors de la mangue, c’est la banane, la papaye, la pastèque, la goyave, l’anacarde (en voilà un beau spécimen) qui se développe un peu un peu.
Hum… AUTRES
J’appelle le karité dont la noix donne le beurre dont l’odeur est certes peu alléchante mais dont les utilisations sont multiples : cuisine, peau et dont les vertus sont avérées pour la peau mesdames, messieurs, avis à ceux qui prennent soin d’eux-mêmes.
La noix de cajou, la graine de sésame, la gomme arabique, la fleur de bissap, le fruit du Ballanites aegyptica (avis aux botanistes). On fait des sirops avec les deux derniers.
Autre catégorie à part, dont l’objet n’est pas l’alimentaire… « J’appelle les demoiselles en vogue…cultures énergétiques, êtes vous présentes en terre malienne ? »… « Eh bien, nous aussi avons une place réservée ici ». Jatropha de son vrai nom s’installe timidement, à l’initiative de compagnie d’agrobusiness françaises et autres… A l’heure de l’expérimentation, en période de menace de crise alimentaire, elles sont font discrètes mais attendent leur heure de gloire…
Je me lance dans les animaux ?
Quand je dis : mali, que fais tu de ta terre et de tes bras, ce sont eux aussi. Les vivres viennent de la terre pour eux aussi, ils la foulent, la piétinent, la vole aux végétaux même parfois. Ils utilisent et sont aussi les bras de l’agriculture malienne.
C’est rapide, ils sont de 4types : les bovins (zébus surtout), les ovins et caprins, les camelins et la volaille. Des chevaux, quelques uns, rachitiques, prêts à te manger le bras si tu tentes d’établir une certaine relation privilégiée à l’européenne avec eux. Oh, les ânes, j’oubliais. Eux sont les jambes et le dos du Mali.
Commentaires : le drame de l’élevage c’est son alimentation. Que fait-on des fruits de la terre pour nourrir les êtres à quatre pattes ? Hum…rien, on les brûle ou on les laisse se perdre. Il faut brûler pour des raisons obscures parfois et on laisse se perdre la paille de riz ou les tiges de mil. Il y a des choses à faire en la matière. Le deuxième talon d’Achille, c’est la santé animale qu’on néglige volontiers faute de connaissance et de moyens.
Quelle exploitation fait-on de tout cela ? Viande, lait, cuirs et peaux, œufs. Tout cela existe mais en des quantités et avec une disponibilité ridicules. La majeure partie de l’élevage bovin se situe au Nord, dans la bande sahélienne et il s’agit d’un élevage transhumant. Difficile dès lors de mettre en place des infrastructures pour l’élevage, des circuits de collecte de lait… Ceci existe et se développe doucement, doucement. Un seul fromage existe à ce jour, la tomme de Koutiala, que je n’ai malheureusement pas eu le plaisir de goûter…Production si petite qu’elle était en rupture très tôt lors du SIAGRI, Salon International de l’Agriculture organisé à Bamako du 24 au 30 avril. Une bonne initiative, vitrine de l’existant et des potentialités agricoles, pas mal.
Pour finir, quelques commentaire épars sur :
- la terre : sujet chaud, épineux quand on aborde la question de la propriété : l’oralité, l’appartenance ancestrale fait loi. Il existe des titres fonciers mais c’est une notion encore peu répandue. Le droit à la terre est une notion très floue.
Il en est de même pour la gestion durable des terres. Concept fumeux pour certains, élément essentiel de la révolution verte envisagée par les optimistes…
Point essentiel : la terre ici, c’est la latérite, la couleur rouge, qui s’amasse sur les plaintes dans les maisons, teinte les cheveux sur la moto…
La terre ici, c’est le sable, qui est le lot de nombre de piroguiers qui font des allers-retours entre le fonds et la surface du fleuve Niger, seau à la main pour en extirper les précieux grains qu’on vendra sur le marché qui porte son nom, pour la construction. Qu’on essaye seulement de s’approcher trop près, appareil photo à la main, de ces tas débarqués des pirogues arrêtées sur la rive…
« Viens ici… viens plonger avec nous… tu sais pas ce que c’est… »
La terre ici, c’est l’or. Le Mali est riche de ce minerai, au sud est. C’est son principal produit d’exportation. Rapportant à une poignée de personnes, le Mali n’en voit guère la couleur…
- les bras, mon second, ce sont tous ceux qui cultivent traitent, transforment, manipulent les fruits de mon premier. Ce sont des hommes en boubous et turbans de coton bleu, des femmes portant leur poids sur leur tête, des têtes coiffées de chapeaux pointus peuls. Ce sont des exploitations familiales d’une vingtaine de personnes. Des femmes pour beaucoup, il faut vraiment le souligner. Mes mots tarissent. Je peux ressentir vote douleur comme la femme dogon qui voit le canal s’assécher au beau milieu de son paysage de roches stériles au moment où prend fin l’hivernage. Pas de crainte, les saisons alternent et chose peu fréquente : la saison des pluies est très précoce cette année : on reçoit de l’eau ici quelques trois fois par semaine… Bon, un long moment, descriptif, passionné, sarcastique… vous êtes fatigués ? Vous êtes curieux ? Vous voulez des infos sur la mode au Mali ? L’accès à la culture/ au sport : à l’information ? Les coutumes en termes de mariage, naissance et mort ? Le sentiment mitigé que l’on ressent en tant que descendant de colonisateur ? La relation entre toubabou (blancs) et farafi (noirs) au Mali ? Posez vos questions, donnez moi vos commentaires ; je me ferai un plaisir de vous éclai
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